J'ai la chance de vivre à une demi-heure de la mer, dans ce qu'on appelle communément le Midi. Cela fait donc des années que je ne pars plus en vacances. Ce serait quand même bien benêt de quitter un lieu de villégiature pour faire comme monsieur tout le monde, et transformer quelques jours de repos en virée cauchemardesque.
Je ne suis d'ailleurs jamais partie en juillet ou août de ma vie. Pour les raisons qui suivent.
- Bison Futé ne l'est pas autant que son nom le prétend, futé. Routes archi chargées le samedi dans un sens, puis dans l'autre.
- Si vous pouvez, partez le dimanche, qui dit, c'est vert. Il est gentillet, le petit sioux. Mais les locations, ça démarre le samedi.
Histoire de bien faire pâturer les vacanciers, qui, après une docile année d'échine courbée, continuent à entretenir leur esprit troupier en démarrant cash le repos gagné en 1936, par des bornes de bouchons.
En plus de devoir rouler cul à cul sur nos belles autoroutes, le budget péage qu'il va s'agir de débourser commence par donner le ton des dépenses à venir : délirantes. Sans compter que le prix à la pompe, même s'il a un poil baissé, reste quand même un poste croque pognon tout ce qu'il y a de sympathique.
Allégés de quelques billets, frais comme des gardons oubliés sur l'étal de la criée du port de Sète en pleine cagne, voilà nos heureux juilletistes -rassurez-vous, amis aoûtiens, ce sera la même pour vous-, prêts à investir leur lieu de repos.
Les supra friqués iront à l'hôtel, en pension complète. Appartement de location pour les plus nantis, dont le prix à la semaine équivaut à un loyer et demi, avec 8 m² par habitant. Bah, me rétorquerez-vous, c'est juste pour y dormir. Raison de plus, ça fait chérot la nuitée. Quand on aime, on ne compte pas, y paraît.
Vous devez bien aimer, alors.
Ceux qui n'ont aucun signe de richesse, extérieure et intérieure, opteront pour le confort spartiate du mobil home, ou de la tente dépliée en deux secondes, avec le matelas mousse de 4 cm qui leur ruinera les lombaires toute la quinzaine. Mais le jaune à onze heures avec les potes de 25 ans, dos en vrac ou pas, c'est sacré.
Viendra le moment de manger. Les commerçants alentours auront subrepticement majoré leur prix, et le moindre 10ème de caddie coûtera son petit billet de 50. Quoi, pain- sardine à l'huile - coca, ça les vaut bien ? Mouais.
Les restaurants, crêperies, sandwicheries, et autres bouis bouis, profiteront de l'affluence pour servir du pas bon au prix d'un bouge 3 étoiles au guide Michelin.
Les glaciers encaisseront sans ciller leur billet de 5 pour deux boules qui finiront, au choix, fondues sur le T-shirt de Killian, 2 ans, ou sur la tong de papa, occupé à mater les nanas court vêtues au lieu de laper sa choco - vanille.
Ensuite, ils iront tous gaiement sur la plage, de préférence entre midi et deux. Ben oui, qu'une semaine ou deux sur place, faut profiter.
Déjà, ils auront tourné une plombe pour trouver à se garer, finiront par payer le parking - pareil, 3 € de l'heure, ça fait péter un câble à personne- et partiront à l'assaut du sable avec leur tonne de matos destiné à les mettre en pôle position des futurs cancérisés de la peau.
Car, en plus d'y aller aux heures les plus déconseillées, ils se tartineront de graisse à traire. Bonne idée, ça, un jour comme ça, t'as niqué les 3 suivants. Si t'as la carnation de Casper, t'as bousillé intégralement tes vacances. Le mélanome ? Une vue de l'esprit. Nan nan, une vue de dermato, en vrai.
Comme tu veux pas te priver, ben t'achètes au vendeur ambulant tout ce qu'il vend. Surtout les chichis, les chouchous et les beignets. Bombes caloriques en puissance, à prix prohibitifs.
A la Grande Motte, cette année, le beurre au sucre et choco - le beignet, quoi-, c'est 2.5 € l'unité. Faut l'enfourner fissa, parce qu'avec les marmots du voisin de serviette - il y a un vacancier tous les centimètres- en train de "queuser un tou poi fai un sateau"- le beignet peut finir pané. Au sable.
Ensuite, il faudra éviter les vives, méduses, dont la mer est l'habitacle naturel, et les cacas des autres, qui se croient autorisés à déféquer dans l'eau tout ça parce que les chiottes publiques sont dégueus.
L'habitat naturel du caca, je le précise pour ceux qui auraient le sphincter en goguette, c'est l'égout.
Bref, les vacances, c'est trop bien. Je n'ai qu'une hâte, c'est que tout le monde reparte chez lui, et récupérer le littoral qui m'est si cher, en septembre. Tout comme j'en ai profité depuis avril.
Ici, la bronzette, c’est un art de vivre. On laisse les brûlures aux touristes.
Allez, sans rancune. Bonnes vacances !